Auteure, humoriste, conférencière, comédienne et maman, Guylaine Guay a conquis le coeur des Québécois en tant que chroniqueuse et à travers ses nombreux rôles au petit et au grand écran.
Mère de deux garçons vivant avec un trouble du spectre de l’autisme, elle met aujourd’hui son humour, sa franchise et son grand coeur à profit dans son écriture et son travail au sein de la Fondation Véro & Louis, dont elle est la marraine... et la muse.
Vous nous avez dit vouloir parler du rôle de mère en 2018. Quelle place ce rôle prend-il dans votre vie?
Je dirais que je suis femme avant tout et mère en second. Je sais que ça surprend un peu, qu'on n'a pas l'habitude d'entendre une mère placer son rôle au deuxième rang, mais j'ai vraiment pour philosophie que si Guylaine ne va pas bien, si elle n'est pas heureuse, elle ne pourra pas rendre ses enfants heureux. Je m'assure donc de prendre du temps pour moi, sans culpabiliser, quand j'en ai besoin.
Ma famille sait que je suis là pour elle, mais que j'ai aussi besoin de solitude et de silence. Et tout le monde s'en accommode très bien! Je pense que lorsqu'on explique ces choses-là, qu'on les nomme, notre entourage les comprend et les accepte.
Parlez-nous de vos deux garçons, Léo et Clovis.
Mon fils aîné, Léo, a presque 18 ans, et mon plus jeune, Clovis, presque 16. Ils ont tous les deux un trouble du spectre de l'autisme. Léo est verbal, plus fonctionnel, et Clovis est non-verbal. Il comprend tout et communique avec tout son être, mais ne parle pas.
C'est Clovis qui a reçu son diagnostic en premier. Il avait 3 ans et présentait plus de signes apparents de l'autisme; il marchait sur la pointe des pieds, ne nous regardait pas dans les yeux et ne parlait pas. Évidemment, ça a été un choc. Il y avait encore très peu d'information disponible au sujet de l'autisme, à l'époque. On n'en parlait presque pas. J'ai dû faire énormément de recherches par moi-même.
Plusieurs années plus tard, Léo a été diagnostiqué à son tour. Son diagnostic, pour nous, n'était pas une surprise, mais plutôt un soulagement; savoir ce à quoi on fait face facilite grandement les choses. Ça lui a également permis d'avoir accès aux écoles et aux services dont il avait besoin. C'est très apaisant, pour un parent, de savoir que son enfant est entre bonnes mains. Malheureusement, tout le monde n'a pas cette chance.
Quels ont été vos outils les plus précieux pour faire face aux besoins particuliers de vos enfants?
Quand je suis tombée enceinte de mon premier, j'habitais au Nunavut et je prenais la pilule... Son arrivée était si surprenante que je l'ai vue comme un signe! N'ayant jamais voulu d'enfants, je n'avais jamais rêvé de l'enfant parfait. Je n'ai donc pas eu à en faire le deuil, et j'ai pu prendre mes fils tels qu'ils étaient. Accepter le diagnostic m'a beaucoup aidée. J'ai relevé ce défi une journée à la fois sans laisser la peur de l'inconnu m'accabler.
Je dois aussi beaucoup à ma capacité naturelle à accepter la différence; chez nous, la perfection et la pression sociale n'existent pas. Je n'ai que faire du regard des autres et de la compétition! Finalement, discuter ouvertement de la condition avec les autres aide énormément. Parler, ça ouvre les cœurs et les esprits.
Parlez-nous de la Fondation Véro & Louis, dont vous êtes marraine et à laquelle vous avez choisi de remettre 1$ par Boite Beauté Végétale vendue.
C'est une histoire magique! En 2014, j'ai écrit un livre, Deux garçons à la mère, qui racontait mon quotidien avec mes fils. Dans un chapitre sur leur avenir, j'ai écrit cette petite phrase : « Je rêve d'une grande maison remplie d'amour, et je sais que quelqu'un de très généreux va lire cette ligne. » Véronique Cloutier l'a lue et m'a contactée.
Un an et demi plus tard, la Fondation était née, avec pour mission de construire et d’administrer des maisons adaptées aux adultes de 21 ans et plus vivant avec un trouble du spectre de l’autisme. À partir de cet âge, les autistes ne sont plus pris en charge par le système public et nombre d’entre eux, comme mon Clovis, auront toujours besoin de soutien au quotidien et d’un environnement conçu pour leur offrir confort et une sécurité. Les maisons Véro & Louis pourront les accueillir à long terme. Quand il aura 21 ans, Clovis ira vivre dans l'une d'elles, et il y restera pour la vie.
C'est un modèle entièrement nouveau qui, on l'espère, sera repris partout au Québec. La première maison, dont la construction est entamée, est située sur un beau terrain à Varennes. Ce qui me touche le plus dans ce projet, c'est qu'on redonne ses lettres de noblesse à la différence. On dit aux gens différents qu'eux aussi ont droit à du neuf, à du beau. À une vie heureuse. Cette maison-là m'offre la paix d'esprit, et j'espère contribuer à ce qu'autant de parents possibles l'aient aussi.
En terminant, quel conseil donneriez-vous aux parents d'enfants vivant avec un trouble du spectre de l'autisme?
Même si le quotidien n'est pas toujours facile, n'ayez pas honte de vos enfants. Soyez fiers de leur différence.