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Yves Rocher
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Entrevue avec Patti Schmidt

Depuis plus de 25 ans, Patti est fortement impliquée dans les milieux musicaux indépendants et underground du Canada comme directrice, musicienne, ainsi qu’animatrice et réalisatrice d’émissions de radio et de programmation événementielle.

Patti a commencé sa carrière à CKUT, la station de radio de l’université McGill en 1987. Elle s’est jointe à l’équipe de SRC Radio 2 en 1991 à titre de recherchiste et d’animatrice remplaçante pour Brave New Waves, une émission nationale, diffusée tous les soirs dès 1984, portant sur les nouveautés musicales, mais plus particulièrement sur la culture et la musique avant-gardiste et futuriste. En 1995, elle est devenue l’animatrice de l’émission et plus tard, la productrice exécutive jusqu’à la fin de sa diffusion en 2007. En 2006, elle a commencé à animer Cinq à Six, une émission de radio d’arts et de culture sur les ondes de Radio 1 à Montréal, elle est aussi devenue l’animatrice régionale et nationale de Canada Live en 2007 et l’animatrice régionale de Inside the Music sur les ondes de Radio 1 et 2. Elle a contribué à la narration de plusieurs documentaires ainsi qu'à la rédaction de projets de développement de films. Ayant composé, produit et joué de la musique pour plusieurs groupes entre 1992 et 2006, elle est demeurée active dans la communauté artistique, faisant occasionnellement le dj et fournissant de la programmation sonore et musicale pour divers événements et lieux. En 2016, elle a été directrice artistique et enseignante principale de Convergence : Musique électronique et Arts visuels en résidence au Centre des arts et de la créativité de Banff. Depuis 2008, elle travaille en tant que commissaire, éditrice et productrice pour le festival MUTEK de musique électronique et de création numérique, basé à Montréal.

Patti SchmidtCrédit photo : @Naskademini - naskademini@gmail.com
 

Pouvez-vous vous présenter ? Énumérez l’une de vos réussites dans l’industrie de la musique underground dont vous êtes particulièrement fière.

J’ai grandi en banlieue d’Ottawa. Un endroit que je trouvais plutôt étouffant et homogène, culturellement et politiquement. Le punk rock américain, le gothique, le ska, le New Wave et la musique alternative d’Angleterre battaient leur plein au début et au milieu des années 80 quand j’étais adolescente et ça a fondamentalement bouleversé mon univers. J’avais plutôt été une athlète jusqu’ici, mais à l’âge de 15-16 ans, le rock-and-roll et ces autres façons de voir et d'être dans le monde sont devenus incompatibles avec ces activités. J’avais hâte de partir et de me retrouver dans une véritable grande ville — qui, selon moi, a toujours rimé avec Montréal. J’ai obtenu un baccalauréat en Communication et Cinéma. Plus tard, à l’âge de 40 ans, j’ai obtenu une maîtrise en Histoire de l’art et Communication.

J’ai décroché mon emploi à l’émission Brave New Waves de la SRC dès la fin de l’université. Travailler sur cette émission de radio à titre d’acheteuse de disques, de chercheuse et finalement, d’animatrice et de programmeuse, pendant 17 ans au total, était un apprentissage autant pour moi que pour les auditeurs. Cette émission m’a permis d’établir une relation et d’instaurer un dialogue avec plusieurs communautés créatives — partout au Canada et dans le monde.

La réussite de l’émission émane de la manière dont elle a pu toucher les gens et je suis extrêmement reconnaissante d'y avoir joué un rôle. C’était une source d’inspiration, de révélation, de nouvelles perspectives et de nouveaux sons, incitant les gens à devenir artistes et créateurs, pionnier ou collaborateurs d’une culture et d’un monde des arts et de la musique qui reçoit très peu de soutien de la part de la société traditionnelle. Cela a encouragé les marginaux et les solitaires, les a connectés les uns aux autres par la magie de la radio et le pouvoir de la musique. Le fait qu'il s'agissait d'une émission nationale financée par les fonds publics en faisait un détonateur puissant. Il y avait tellement de courrier d’auditeurs émus, touchés et transformés par l’émission. Les gens viennent encore me voir aujourd'hui pour m’exprimer leur gratitude et me parler de l’impact que le contenu a eu sur leur histoire personnelle. Je reste incroyablement humble mais extatique à la fois devant le privilège qui m’a été donné de catalyser une partie de cette aventure. Une autre de mes réalisations notables a été l’opportunité de mener de front une certaine action subversive qui s’est enracinée au commencement de l’émission en 1984. L’émission ayant été créée par un homme et une femme, tous deux homosexuels. Tous les animateurs qui ont suivi, y compris moi-même, ont pu subtilement apporter une perspective homosexuelle et une vision politique progressiste sur les ondes, sans pour autant que les auditeurs s’en aperçoivent.

 

Comment la musique vous a aidé ou influencé pendant des changements importants de votre vie ? Avez-vous rencontré des femmes inspirantes en cours de route ?

La musique a toujours été mon portail sur le monde, non seulement grâce à sa capacité à transmettre l'émotion et la poésie, mais aussi parce qu’elle me transporte vers d’autres lieux et cultures et m’expose à d'autres façons de faire et d’agir. La musique a été ma première porte ouverte sur la littérature, le cinéma, l'art contemporain, la politique, la sociologie et la science.

De façon générale, je ne rencontre pas des femmes inspirantes sur un plan personnel, mais à travers leur art ou leur activisme. De peur d’être exhaustive, je ne peux pas vous donner une liste définitive. En revanche, j’encourage tout le monde à faire des recherches et prendre en considération toutes les femmes pionnières de la musique jazz, rock, punk, électronique, hip hop, classique et avant-gardiste. Cependant, je dois dire que de rencontrer Adrienne Clarkson, ex-gouverneure générale a été un moment marquant dans ma vie. C’est une personne que j’admire, elle incarne un mélange inspirant et élégant d’arts, de politique et d’activisme.

 

Au regard de votre longue carrière et votre position actuelle dans l’industrie des arts numériques et de la musique électronique, selon vous, qu’est-ce qui a changé pour les femmes dans votre industrie du temps où vous avez commencé versus la situation actuelle ?

De plus en plus de femmes s’imposent et jouent un rôle de premier plan dans la culture et la création de musique électronique et d’arts numériques, c’est incroyable à voir. Même si les attitudes et les préjugés sexistes restent ancrés et dominent encore la culture dans son ensemble, je n’ai jamais été témoin d’une telle explosion de créativité féminine qu’au cours de ces quelques 10 dernières années.

D’être prise au sérieux a souvent été un défi. C’est le cas de toutes les femmes quel que soient les domaines. D’être entendue représente encore un autre défi. Björk a dit : « Tout ce qu’un homme ne dit qu’une seule fois, on doit le dire cinq fois. » Les femmes doivent être plus agréables et aimables que leurs homologues masculins et si on veut avoir accès au cercle rapproché des hommes les plus décisionnaires dans mon milieu et mon industrie, il nous faut maîtriser nos émotions et nos opinions selon des modalités qui m’ont souvent préoccupée. Je crois aussi qu’il est plus difficile pour les femmes plus âgées de se frayer un chemin dans le monde de la musique, tout comme ça l’est pour les actrices vieillissantes. Les rôles et les modèles se font rares, je me suis souvent sentie perdue, sans boussole pour m’indiquer comment agir.

 

La 18e édition du festival MUTEK Montréal aura lieu du 22 au 26 août 2018 et mettra en vedette des femmes de l’industrie de la musique électronique et des arts numériques sous la bannière du projet Keychange, une initiative qui vise à l’autonomisation et le renforcement professionnel des artistes féminines. Pouvez-vous nous en parler davantage ? Quels seront les changements concrets apportés à cette édition ?

Le projet Keychange a été initié par PRS Foundation au Royaume-Uni en réponse à la faible participation des femmes dans la création de musique à travers l’Europe, incluant leur présence sur les scènes de festivals et leur participation aux conférences. MUTEK est l’un des 7 festivals fondateurs du projet qui vise à lutter contre la discrimination et à augmenter le nombre de femmes faisant partie de leurs programmations en encourageant les festivals à atteindre la parité d’ici 2020. L’autre élément déterminant est l'engagement envers le développement des carrières et des compétences, ainsi que l’élaboration d’un réseau de femmes multidisciplinaires dans le monde entier. J’aide à organiser un symposium de deux jours (21 et 22 août 2018) pendant lequel aura lieu des discours de femmes remarquables travaillant dans le domaine de la musique électronique et des arts numériques, ainsi que des panels, des présentations et des ateliers. Plus de 35 femmes artistes et novatrices du Canada, du Royaume-Uni, d'Europe et d'Amérique latine participeront au symposium en plus de donner un spectacle durant le festival.

Cette année, nous atteindrons la parité dans notre programmation, ce qui aurait semblé impossible il y a seulement quelques années.

 

MUTEK est le seul partenaire non européen et point d’ancrage pour ce projet en Amérique. Étiez-vous impliquée personnellement dans l’implantation de ce projet à Montréal ?

J’ai toujours été impliqué personnellement dans l’avancement de la cause des femmes  à MUTEK. Étant la seule femme travaillant à la programmation depuis 10 ans, j’ai souvent pris la parole sur l’intégration et la diversité. De plus, j’ai insisté pour que nous mettions au point des politiques et des actions portant sur la sensibilisation car les choses ne changent pas d’elles-mêmes. Au cours des deux dernières années, les femmes ont commencé à bénéficier d’une présence accrue au festival, mais Keychange nous a fourni un contexte plus précis dans lequel nous pouvons poursuivre le travail. Je travaille activement sur notre version du projet depuis l’automne dernier, j’ai hâte de voir le résultat final.

 

Le projet est très intéressant et important dans le contexte actuel. Pensez-vous que les acteurs principaux de votre industrie sont plus ouverts et apportent un plus grand soutien en faveur de l’égalité entre les genres ?

L’évolution est lente et une résistante persiste toujours, mais il est maintenant possible d’avoir une conversation et le dialogue est en cours. J’ai vraiment l’impression qu’il y a eu une ouverture en ce qui concerne non seulement la discussion sur l’équité et la question des genres, mais aussi transversalement, à travers les classes et les communautés. Pendant les 15 dernières années, je me suis sentie bloquée par les questions concernant l’égalité et la perception des genres. Cependant, il y a actuellement un changement générationnel, un élan dans l’air.  Peut-être que la jeune génération qui réclame un changement juste et justifié, ne comprend pas nécessairement le féminisme ou encore le perçoit de façon péjorative à cause de l’animosité et de la fausse représentation endurés par le féminisme. Néanmoins, j’ai grand espoir que nous avancions dans le bon sens, quelque part en terrain nouveau. Je constate aussi qu’une fois que les dirigeants commencent à se rendre compte des injustices, ils ne peuvent plus fermer les yeux.

 

Nous pensons que vous pouvez inspirer des femmes à prendre des initiatives dans leurs propres domaines. Quel serait votre meilleur conseil pour celles qui souhaitent contribuer à la cause des femmes ?

Prêtez attention à la manière dont le monde fonctionne et remettez-le en question. Étudiez comment le pouvoir se manifeste et comment les structures et les partis pris ont une incidence sur l’ensemble. Lisez. Discutez. Agissez. Adoptez le féminisme. Cela représente l’équité.   

 

Comme vous le savez, Yves Rocher Canada s’est engagé à verser les fonds récoltés à la cause que vous avez choisi de soutenir par l'entremise de notre campagne Agir en Beauté. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette cause ? Pourquoi vous tient-elle à cœur ? Quelle est leur mission ? Etc.

J’ai choisi d’appuyer Parce que je suis une fille de Plan International Canada

https://plancanada.ca/fr/parce-que-je-suis-une-fille

Plan International Canada - Parce que je suis une fillePlan International Canada - Parce que je suis une fille

Ils ont un excellent classement parmi les organismes de charité en termes de distribution de fonds et d’impact social.  

De portée internationale, leurs programmes parrainent des filles dans le monde entier, ce qui signifie comme ils le soulignent, que « les filles continuent de faire face à des obstacles uniques qui portent atteinte à leurs droits et les empêchent de réaliser leur plein potentiel. La discrimination à l’égard des filles engendre de graves injustices, telles que la violence sexiste, l'abandon scolaire forcé, le mariage et la grossesse prématurés. »

L'autonomisation des filles est essentielle pour parvenir à l'égalité des genres.

 

Plan International CanadaCrédit photo : Courtesy of Plan International Canada

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